Ceci est une partie du script de la release Ex0018 du programme CPU, diffusé Jeudi 04/02 à 11h. Plus d'infos sur le site de l'émission. logo de l'émission CPU

Bonjour à toi, enfant du futur immédiat, toi qui va écouter aujourd'hui une émission qui aura son caractère.

Aux débuts de l'informatique, quand la machine su écrire des chiffres et des lettres, tous ces symboles étaient d'une largeur fixe, qu'ils soient un m ou un l, ce que l'on appelle du monospace chez les concessionnaires automobiles. La raison de cette égalitarisme horizontal venait du fait qu'à l'époque, on utilisait des appareils à télétypes, des sortes de machines à écrire, pour discuter avec le Gros Ordinateur, qui est dit lors de la pause clope qu'il siègerait au fond du couloir à côté de la Direction Générale.

Alors oui, il y eu des fantaisistes qui firent dans les années 1950s des polices informatiques, carrégulaires et futuristes en diables, mais ces polices là, elles ne servirent que pour les publicités et les films d'anticipation.
Puis quand le tube cathodique devint enfin utilisable par l'Ordinateur, on divisa sa surface en une grille, en général de 80 colonnes par 25 lignes, où il ne fut permit qu'à un seul caractère d'exister à la fois dans chaque case.
Les premières polices de caractères spécifiques à l'informatique firent leur apparition, avec cette curiosité pour ceux qui connaissaient l'imprimerie de cette contrainte qu'est le pixel : Le caractère devait donc être dessiné à partir d'une grille monochrome, c'est à dire donc des points élémentaires, indivisibles soit noir ou vert, d'une taille généralement égale à 8 pixels horizontaux par 8 pixels verticaux, 13 chez les moins chiches.

Et encore, le nombre de caractères étaient limitées : pas plus de 224 affichables, ce qui posait des problèmes dans certains cas particuliers... euh non, en fait, cela a posé des problèmes au monde entier, mais il faudrait plusieurs émissions pour en parler.

Inutile de dire que la qualité de l'écran y a beaucoup joué : les points étaient flous, le sont devenus encore plus quand les écrans couleurs sont arrivés.

Enfant du futur immédiat, un jour la RAM devint moins chère et arrivèrent les modes graphiques en plus du traditionnel mode texte. Il devint alors possible de faire en sorte que la largeur des m ne soit plus la même que celle des l, ce qui ajoutait en lisibilité. Il devint aussi possible de faire les lettres à des tailles différentes, d'avoir des variétés de polices plus grasses ou en italiques, c'est à dire penchées sur la droite, bref plus libérales... Tout d'un coup, les symboles affichables n'étaient plus cadrés dans une grille rigide, même si les pixels étaient encore la base élémentaire d'affichage. C'était à une époque où l'art de l'enluminure et du lettrage commençait à s'exprimer dans les rues à la bombe.

Et encore, différentes améliorations graphiques, comme l'anti-aliasing allaient ajouter au rendu des polices de caractères une élégance, et donc dépasser les limites d'affichage. La police devint vectorielle, libre, et foin de bœufs-carottes. on n'était même plus limité par le nombres de symboles, go sur les lettres arabes qui s'écrivent ligaturées de droite à gauche et les kanji japonais accompagnées de leurs kana en furigana !

Bien des années ont passé. Les écrans ont maintenant la même finesse qu'une impression quadrichromique (environ 300 dpi), donc les limitations qui dictaient l'aspect des caractères ont désormais disparus. Ainsi la primauté artistique aux fontes non sérifées comme la Helvetica sur la Garamond pour un problème de confort de lecture sur écran est-elle maintenant un débat d'arrière-garde. Cela fait depuis les années 1980s que les polices prévues pour l'imprimerie sont désormais conçues sur ordinateurs. Et en frise-t-on même l'excellence : Il est possible par exemple de faire une ligature entre un f et un i consécutifs (non, dans l'autre sens), sans même y penser grâce à la gestion graphique des polices. Bon, celle du e dans l'o, non, parce que c'est le rôle du correcteur orthographique.

Même les standards du web ont évolué vers les règles de typographie moderne, et peuvent même charger des polices à la volée, spécifiquement au site web d'une entreprise.
Par exemple, la police du site web de notre programme cpu.pm utilise la police Roboto Condensed créée pour Android par Google, de part sa simplicité, sa légèreté des fichiers, sa lisibilité en petite taille, le fait qu'elle soit compacte au rendu et surtout l'absence de redevance à payer sur son usage.

Et la ponctuation qui avait fleuri au Moyen-Âge et à la Renaissance, avant d'être réduite aux symboles simples de maintenant (point, virgule, guillemets, trois petits points, fermez la parenthèse, virgule), les voici qui reviennent à la charge avec les caractères décoratifs dingbats et depuis une génération débridée, les emoji colorés et animés.

Enfant du futur immédiat, l'informatique a permis à la typographie de dépasser les limites physiques traditionnelles. Mais la typographie est un art dont il ne faut pas en négliger l'histoire, les enseignements et les usages.