Ceci est une partie du script de la release Ex0021 du programme CPU, diffusé Jeudi 25/02 à 11h. Plus d'infos sur le site de l'émission. logo de l'émission CPU

Bonjour à toi, enfant du futur immédiat, toi qui chattes désormais non plus sur Caramail ou sur 36-15 BonjourMadame, mais sur Facebook Messenger ou Google Hangout.

Parait que je passe pour un vieux croûton auprès de toi, car j'adore utiliser les e-mails. Or, il est dit que l'e-mail a tendance à disparaitre. Non pas parce que faute de quota trop serré, on les efface pour gagner de la place, mais en usage. Du moins, c'est ce que les études prospectives n'arrêtent de nous dire depuis plus de 15 ans. Oui, Mercure, le messager instantanée qui est plus vif que le Vif Argent, bat à plate couture SMTP non pas de vitesse mais en gain de popularité.
Or la messagerie instantanée est aussi vieille que les e-mails, sauf qu'elle est loin d'être aussi standardisée : entre les SMS, IRC, les outils de messagerie d'Apple, Facebook, Microsoft et Twitter, Google Hangout, Skype, cela fait beaucoup de monde, et très peu de bibliothèques logicielles en commun.

Il y a bien eu à une époque une tentative de standard, XMPP, qui a faillit être utilisé par tout le monde. Je dis bien failli car Google, Facebook qui s'en servaient, s'en sont détourné même pas 3 ans après. Et clair, si ta copine t'attends sur IRC alors que tu es sur MSN, on en est pas sorti.

Mais avant d'aller aussi loin, cherchons avec des raisonnements sociologiques voire purement comportementaux ce qui différencie effectivement la communication par e-mail de la communication instantanée, celle qui ne supporte pas de rester à infuser. J'en ai noté 5. Or qui dit 5 dit ordonner, et qui ordonner, dit...

Le top 5

(eh ben oui, ça faisait longtemps)

1 - D'abord, l'immédiateté, le direct. « Thank you Captain Obvious » me dis-tu avec cet air dépité, mais avoue que les e-mails ne mettent pas forcément plus longtemps de nos jours pour arriver au destinataire de ta correspondance e-épistolaire. On a même des cas où les messages arrivent bien plus tard. Cette année encore, j'ai reçu les SMS du nouvel an avec plus de 5 jours de retard.

2 - Ensuite, un point présentation avec le flux de discussion. Celui-ci est invariablement vertical, du haut vers le bas, et se lit comme un dialogue de théâtre de boulevard pour les discussions les plus orageuses, ou comme une notice juridique inutile pour les discussions avec les services après vente. Les divergences de conversations mises au même niveau que les trolleurs, cela permet à chacun d'être d'équerre à la timeline verticale... du mois jusqu'à se faire bannir de la conversation.

3 - La gestion de groupe, pour satisfaire à la fois ton instinct grégaire, ou en fonction des situations. Que l'on soit dans un salon sur la cuisine ou dans un canal dédié aux applications métiers, on a donc la possiblité de se faire un petit coin d'appoint et d'en marquer la couleur d'entrée : « Ici, on cause d'abord Javascript en ECMA 6, amateur de jQuery, passe ton chemin ! » ou encore « Équipe bleue fraggue du rouge bien saignant ». La messagerie instantanée a la finesse des communications CB des routiers, tout en ayant à la fois l'utilité du collaboratif d'entreprise que le fun du vocabulaire des FPS.

4 - L'absence d'archive. Car après tout, dans la discussion instantanée, ce n'est pas comme dans les e-mails où la signature rappelle la responsabilité du service juridique et de ne pas imprimer inutilement ce message. Non, sur IRC, on oublie pertinement la notion d'archives et donc les insultes partent très très vite.

5 - La principale utilité pour certains de la messagerie instantanée est de connaitre le statut de son correspondant. Parce que oui, avoir ce goût du guet façon stalker de ses subordonnés est comme une seconde nature chez certains chefaillons. Dès que son icone à côté de son nickname indique une disponibilité supposée à 6h30 du matin (heure où son smartphone le réveille et où donc Skype notant une interaction, passe immédiatement son statut en en ligne), quel plaisir de commencer sa journée par un « Bonjour Gérard, dispo maintenant pour un point sur le dossier Tartenpion ? »

(classement totalement subjectif, écrit à 3h du matin en ayant mis mon status Skype en hors ligne)

Reprenons l'arrivée chez tout-un-chacun du chat

(et pas que du félin)

L'arrivée du messager instantanée pour le grand public se perd entre les BBS aux États-Unis et les salons feutrés du 36-15 Ulla pour ces cochons de Français. Le service de messagerie expresse mais courte qui se montra plus utile et plus répandu est à ce jour le SMS. Nokia sorti en 1994 le premier téléphone portable capable d'envoyer un message court. Mais de part la capacité mémoire très restreinte des cartes SIM de l'époque, il est impossible de garder plus d'une vingtaine de messages dans son téléphone.
En 2007, Apple rénova le SMS en popularisant une présentation par interlocuteur, au lieu d'une présentation purement chronologique, comme si le SMS était une version sans fil de MSN ou des messages textes de Skype.

La messagerie instantanée se caractérise par un envoi et une réception instantanée, mais aussi par une écriture très courte. Il faut reconnaitre qu'elle a ce quelque chose de fun jusqu'au abréviations. Les formules de politesses sont même esquissées, voire absentes, là où le formalisme des SMS professionnel s'accompagne de 40 lignes de mentions légales qui n'engagent en rien et que plus personne ne lit. Or, en entreprise, la messagerie instantanée est aussi ravageuse qu'un coup de téléphone : que tu sois disponible, ou que tu ne le sois pas, invariablement, tu répondras toutes affaires cessantes. Il y a donc souvent l'oubli que l'interlocuteur n'est pas forcément disponible pour te répondre.

Enfant du Futur immédiat, si des fois je ne te réponds pas dans l'immédiat, c'est que des fois, je suis AFK, away from keyboard, occupé loin de mon clavier.
Oui, cela m'arrive à moi aussi, et je ne le fait pas forcément par malice.