Supplément Week-End, le magazine des cultures geeks Notes de direct pour l'émission « Supplément Week-End » du Samedi 23 Mai 2009.

Des mouvements suspectés de dérives sectaires actuellement en activité, entre Raël, les Rosicruciens et autres “naturopathes” ou “néo-religieux”, l'Église de Scientologie est unanimement considérée comme la plus dangereuse car la plus influente. Ses stars, son budget pharaonesque et sa mythologie soigneusement travaillé pour essorer un maximum d'argent de chacune de ses victimes... Elle tient à la fois de l'inquiétant et du mystère, avec la plupart des témoignages tus par ses avocats.
La parole de ses victimes est donc plutôt rare. Qui a envie d'avouer qu'il a été suffisamment naïf pour se faire piéger ? Qui a envie de se battre face à des bataillons d'avocats ? Qui a envie de continuer à subir des menaces anonymes ? Voire face à la promesse d'un remboursement, qui a envie de continuer un combat épuisant ?

Basée sur l'œuvre de l'écrivain Ron Hubbard, une flopée d'écrits plus ou moins disponibles au grand public, un système d'échelons internes servant à la fois de garants d'un « grand secret religieux » et d'autorité militaire, et d'un alibi pseudo-scientifique afin d'avoir en façade une cohérence plutôt forte, et permettant de convaincre les futures victimes.

L'Église de Scientologie est classée comme une organisation dangereuse en Allemagne, comme secte en France, est poursuivie dans plusieurs pays, dont la Belgique, pour pratique illégale de la médecine et escroquerie en bande organisée. Même aux États-Unis où elle est plutôt respectée, de récentes poursuites déposées par des ex-scientologues l'accusent de trafic humain et d’avortements forcés.
D'après le témoignage de personnes qui en ont fait partie, l'Église de Scientologie tiendrait à la fois d'une organisation machiavélique dans sa mécanique d'enrôlement, dans son fonctionnement interne par son système de progression « voie vers la liberté totale » basée sur des échelons qu'on gravit à fortes dépenses, mais aussi pour faire taire toute voix discordante partant vers l'extérieur.
Par exemple, en attaquant les psychiatres, des professionnels capables de diagnostiquer si un individu est victime de techniques de manipulations mentales, elle tente de décrédibiliser une profession médicale, scientifique, régie par une loi et une déontologie, la mieux placée pour mettre en garde contre ses pratiques.
Alors ne croyez pas que les techniques soient anodines. La Scientologie, via une de ses officines, distribuerait actuellement en France auprès de médecins et de députés des DVD dénonçant « Les méfaits de la Psychiatrie ». Et cette organisation soutiendrait via ses associations plusieurs thèses qui mettent en cause la psychiatrie comme responsable du massacre des juifs pendant la IIème Guerre Mondiale. Un tel effort doit avoir une raison.

Pendant-ce-temps là, la mission de la Miviludes (Mission Interministérielle de lutte et de vigilance envers les mouvements sectaire) est actuellement minimisée par le Ministère de l'Intérieur, quand elle ne se fait pas activement attaquée par des instances Européennes qui semblent avoir été noyautées par certains intérêts, se faisant accuser d'entraves à la liberté de religion.
Heureusement que l'on a le droit de choisir sa religion, mais une croyance ne doit pas devenir un lavage de cerveau, une industrie de l'exploitation de la misère affective.

L'Église de la Scientologie est actuellement poursuivie pour escroquerie en bande organisée. Le rapport du Juge Fennec, président de la Miviludes, vient de sortir il y a deux jours (au moment de l'émission). Mais ce n'est pas ce genre de littérature que je chronique aujourd'hui.

Non, aujourd'hui, je vais vous parler d'une BD qui est sortie il y a quatre ans. C'est le témoignage de Marion. Marion travaille dans une importante boite de pub Parisienne. Saturée de travail, stressée, pratiquement pas de vie amoureuse, et prenant de la drogue pour avoir le sentiment de faire la fête en soirée.
Un ex de Marion va revenir dans sa vie, et lui parler d'une nouvelle philosophie religieuse qui pourrait lui changer la vie.
C'est exactement ce qu'il va lui arriver, mais pas dans le sens qu'elle croit.
Elle va entrer dans un petit cercle, d'abord s'amuser puis embrasser les croyances, avoir des amis très bien intentionnés... pour finalement partir en stage de motivation à Copenhague. Sans un sou, travaillant pour une misère dans des conditions particulièrement dangereuses, tenue dans un état de fatigue physique pour mieux accepter ce qu'on lui enseigne au nom de sa nouvelle religion, dans une ville dont elle ne parle pas la langue, coupée de ses amis, de sa famille, bref totalement déracinée. Prête à accepter n'importe quoi ?
L'histoire aurait pu finir très mal.

Le témoignage de Marion, l'Église de Scientologie l'a acheté en lui promettant de lui rembourser 70 000 Francs (à peu près la somme qu'elle a dépensée dans cette organisation) contre l'abandon des poursuites qu'elle a initié pour escroquerie. Néanmoins, dix ans après, cette histoire la hantait encore, et elle a accepté d'en parler aux auteurs de cet album.

Une BD qui a été passée attentivement au filtre des avocats pour éviter tout procès. Tout comme le texte de cette chronique.

Un ouvrage préfacé par Catherine Picard, présidente de l'ADFI, que je vous recommande, et je m'en fiche si Thomas va hurler parce qu'après ça, on aura plus jamais l'occasion d'interviewer John (Travolta) ou Tom (Cruise).