« Aquablue »
#1 : « Nao »
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collection Conquistador |
Sa rencontre avec Olivier VATINE fut un amalgame durable, qui ne s'arrêta que violemment par la "Grande Brouille" (voir plus bas). Scénariste de bien des séries (« Adios Palomita » et « 500 fusils ») chez Delcourt, il est aussi l'un des activistes de la collection Série B (dont « Cryozone », dessinné par Denis BAJRAM). Il aurait écrit un ouvrage sur l'aviation et scénarisé un jeu vidéo (?). C'est un noctambule, fou furieux de Doom.
Dessinateur #1~4 Olivier VATINE
Rencontra CAILLETEAU dans le journal Pilote (« Fred & Bob »), pendant l'époque où le rédacteur en chef fut Guy DELCOURT. Ensemble ils produirent deux albums au ton humoristique: « Galères balnéaires » qui fut la première b.d. du catalogue Delcourt et « Stan Pulsar », entrée dans le monde s.f. Il initiera « Carmen Mc Callum », « Adios Palomita » et « 500 fusils ». En 1993, il sera recruté par Dark Horse comme character-design de la suite de « Star Wars » en dérivé comics. Il créera sa prochaîne série intégralement seul.
Dessinateur #5~7 Ciro TOTA
Débuta dans le comics à la française, il créa les séries dans les magazines Lug («Strange», «Titan» et «Mustang») vers 1984. A produit sur un scénario de CAILLETEAU de « Fuzz & Fizzbi » chez Glénat.
Enfin la fin du premier cycle ! Enfin le cinquième tome après plus de cinq ans d'attente... La conclusion de l'histoire de la planète Aquablue. Mais au fait, comment ai-je pu aimer ÇA ? Le scénario est ultra-prévisible, le dessin des premiers albums passable, l'intrigue manichéenne, les personnages bourrés de clichés. Et pourtant cela a plutôt bien marché. Pourquoi ? parce que c'est de la science-fiction grand public !
Le futur. La Terre colonise des systèmes proches. Elle est gouvernée officieusement par d'avides multinationales. Un luxueux paquebot naufrage suite à une collision avec une météorite. Seuls rescapés, un bébé et un robot nurse. 5 ans après avoir dérivé, leur chaloupe amerrit sur la planète océan Aquablue. Cybot, le robot nurse disjoncte suite à un plongeon, tandis que l'enfant est recueilli par les indigènes.
10 ans après ce régime « Greystoke » (revoyez le film, bande d'incultes!), Nao est en passe d'être définitivement intégré parmis les indigènes "peaux bleues" amphibiens. Il est même fiancé avec Mi-Nuée, la fille du chef Melkeïok. Surgit Maurice Dupré, exo-éthnologue, pour le rappeler à la "civilisation". Débarque Phlebs de la multinationale Texec, épaulé par Ulla Morgenstern, son lieutenant Fritz et ses mercenaires. La Texec compte installer des centrales de refroidissement sur l'océan d'Aquablue, condamnant la planète à devenir un désert glacé. Ce qui n'est pas du goût écologique de Dupré. Or, en reconnectant Cybot, il apprend que Nao n'est autre que Wilfrid Morgestein, neveu d'Ulla et surtout héritier d'une immense fortune. Ulla a pu monter son armée d'opérette exclusivement grâce à cet héritage. Nao est donc à abattre.
Dans le deuxième tome, Nao et Dupré sont sur Terre pour reprendre l'héritage et couper les vivres des mercenaires. Ils tentent de médiatiser l'affaire de la colonisation abusive d'Aquablue, l'occasion pour Dupré de retrouver son ex-femme journaliste Béatrice. La justice donne vite raison à Nao, mais Colonel Morgenstein, conseillée par la Texec, met sa fortune à l'abri en Suisse, les médias sont muselés par leurs actionnaires... Bref, rien ne marche comme prévu. Pendant ce temps, la situation se dégrade pour les indigènes. Ils doivent fuir leur village pour la banquise polaire. Mi-Nuée s'embarque clandestinement à bord d'un transport à destination de la Terre, mais se fait pincer. Arrivée à destination, elle s'échappe à Walsh, libidineux président de la Texec et arrive à rejoindre Nao.
Ne pouvant agir sur Terre, ils décident de repartir à Aquablue, grâce à l'aide de Carlo, pilote casse-cou du "Stromboli", italien jusqu'au boût des ongles. Interceptés par la chasse des mercenaires, le "Stromboli" s'écrase sur la banquise, à deux pas des indigènes déplacés.
Les deux premiers opus étaient plutôt pour gentillets, les trois suivants un poil plus noirs.
Les mercenaires de la Texec sont attaqués par le « Mégophias », le plus redoutable des vaisseaux pirates. Grâce à un ami de Carlo, le berbère Rabat, les indigènes arrivent à un accord avec les pirates : fournir armement moderne contre menu travail. Le vaisseau doit néanmoins amerrir pour réparer. Le chef des indigènes Melkeïok et Béatrice reçoivent aussi le soutien du sous-marin mutiné des mercenaires. Mais qui est fiable dans tous ces alliés ? Le chef pirate compte en fait monnayer Phlebs, Ulla et les installations Texec sur Aquablue contre un gros chèque. Nao, apprenant la trahison des pirates, mène une attaque contre le « Mégophias », toujours en réparation. Mené de haute lutte, les pirates seront terrassés, le « Mégophias » coule, mais les prisonniers sbires de la Texec s'enfuient.
Dans le quatrième tome, alors que Nao et les indigènes semblaient avoir le dessus, débarque la Légion étrangère, surarmée, surentraînée et commandée par le général de Blainville. À la différence des mercenaires d'Ulla Morgenstein, ils ne font qu'une bouchée des troupes de Nao. Walsh, le président de la Texec, débarque. Au moment où il allait virer Phlebs et les soldats de fortune, il sera assassiné par son second lors d'une attaque surprise. De Blainville arrive vite à boût des ilôts de résistance, tandis que les mercenaires d'Ulla emprisonne les indigènes. Ces derniers sont victimes des ignobles expériences du Dr Fershid, sorte de Mengele amenée par Morgeinstein. Cette dernière veut faire chanter Melkeïok et Mi-Nuée. Nao est allé rencontrer ceux qui furent sur Aquablue avant les indigènes.
Dans le cinquième tome qui vient de sortir, « le projet Atalanta », on apprend enfin les grands secrets de la série. Qui sont les mystérieux habitants des profondeurs, de quoi est capable le virus du Dr Fershid, et les secrets des constructions au fond de l'océan, des uru-uruks, des visions de Nao... et surtout comment nos héros s'en sortent pour vivre les aventures du cycle de « l'Étoile blanche » (déjà parus)!
À la (re)lecture, on sent un script qui est développé au coup par coup, au fur et à mesure de l'inspiration et du succès. La série était d'abord destiné au très jeunes, d'où le souffle héroïque. Entre le premier et le deuxième tome, le tirage a décuplé. Le succès, imprévisible, est déjà là, mais reflète un public plutôt adolescent. D'où cette impression de deux époques (et styles) distincts entre les tomes 1, 2 et 3, 4. Les auteurs de cette série n'étaient pas à leur coup d'essai: Thierry CAILLETEAU et Olivier VATINE avaient déjà produit deux albums au ton humoristique: « Galères balnéaires » qui fut la première b.d. du catalogue Delcourt et « Stan Pulsar », entrée dans le monde s.f.
Dark Horse USA, recherchant de nouveaux designers pour son comics dérivé de « Star Wars », propose en 1994 au dessinateur de venir voir quelques bout de péloche dans le ranch Skywalker de George LUCAS. VATINE s'exécute immédiatement... et oublie de renvoyer l'ascenseur à CAILLETEAU comme prévu dans le contrat. Depuis, ils ne s'adressent plus la parole... Alors inutile de croire qu'ils auraient pu se réconcilier pour terminer « Aquablue ».
Mais pendant les heures de la Grande Brouille, le scénariste Thierry CAILLETEAU prend Ciro TOTA pour produire une aventure bien après les "évènements". C'est l'histoire complète « Étoile Blanche » où Nao et ses amis sont capturés par des pirates et emmenés dans l'épave du vaisseau où tout a débuté... Un peu frustant de savoir que nos héros s'en sortent mais pas comment. Si l'histoire repasse vers une tranche d'âge plus jeune, elle permet de vérifier que TOTA s'adapte bien au type de l'histoire, même si son style est très différent de VATINE. C'est décidé... TOTA dessinera l'ultime opus. Même s'il tente d'imiter VATINE, la coupure est nette, presque brutale. VATINE a un trait brut, plein de mouvement, peu détaillé, tandis que TOTA joue sur la finesse du trait et des détails, un poil statique.
Bref, on a la fin attendue, mais d'une graphie différente. On a aussi un clin d'oeil cruel à « Star Wars ». Va savoir pourquoi, c'est dans la série où ils se sont révélés que CAILLETEAU règle ses comptes avec VATINE, en frappant dans ce qui les a inspirés ! le "Stromboli" ressemble étrangement au "Faucon Millenium" de Yan Solo (Revoyez « Star Wars », nom di diou!). « Aquablue » reste une série s.f. au souffle épique, qui aura incité deux collections chez Delcourt "Néopolis" et "Série B".
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Xavier MOUTON-DUBOSC chronique: Loi des séries «IN`DIGEST» #136 20 X 1998 Web 21 X 1998 |