Notes de direct pour l'émission « Supplément Week-End » du Samedi 22 Avril 2006.
Un film de James McTeigue, scénarisé par Andy et Larry Wachowski. Avec Nathalie Portman, Hugo Weaving, Stephen Rea, et John Hurt.
Dans le Londres de la fin du XXème siècle, l'anarchiste masqué (ou terroriste, c'est selon) V sème la panique dans le bien organisé régime totalitaire en place. Explosions, meurtres, messages subversifs... De son côté, la jeune Evey Hammond a perdu ses parents, agitateurs gauchistes. Le jour où V sauve Evey d'une agression par les hommes du Parti, leurs vies vont se trouver liées. Elle deviendra sa protégée, son élève, son amour platonique.
Adapter la BD de Moore et Lloyd n'était pas une sinécure. Elle est dans l'ensemble très bavarde, avec beaucoup de monologues, des personnages citant souvent des romanciers. Ce n'est pas non plus une BD où ça bouge, dans le sens aventure/action genre "super héros". Dans ce cas, comment transposer ça sur grand écran, surtout si le film doit sortir au moment où le film de super héros bat son plein, où les pouvoirs sont montrés sous tous les angles, où les héros doivent baigner dans la coolitude, et s'expriment par leur prouesse physique plutôt que par du charabia couvert par les popcorns ??
Les frères Wachowski ont donc prouvé, avec ce scénario, qu'ils pouvaient être aux commandes d' un métrage sans effets visuels tape-à-l'oeil, verbeux, aux dialogues longs, parfois poétiques, et musicaux (concernant le dialogues, il est vrai que leurs « Matrix » en comportaient pas mal, et beaucoup à double-sens). La mise en scène sobre de Mc Teigue, le premier assistant réalisateur des « Matrix » et de « Star Wars 2 : l'attaque des clones », souligne les rebondissements imaginés par Alan Moore sans jamais en faire des tonnes. Tout juste montre-t-elle un combat final au ralenti et aux cadrages travaillés (la caméra dans le barillet d'un pistolet).
Le profane qui n'a pas lu la BD est ainsi happé par l'histoire, spectateur de scènes inhabituelles pour un blockbuster et ce type de casting (baisers lesbiens, plan sur les mains brûlées de V, rasage en direct des cheveux de l'actrice principale, meurtre d'une fillette, cadavres dénudés entassés). Le passage émouvant de la BD concernant Valérie, la voisine de cellule de V à Larkhill, a été repris dans son intégralité dans le film et représente un petit court-métrage remarquable à l'intérieur du long. Pour les amateurs de l'oeuvre de David Lloyd et Alan Moore, quelques raccourcis flagrants liés à la suppression d'un personnage secondaire, la télévision remplaçant la radio, et quelques scènes importantes remodelées (l'introduction et la fin) choquent inévitablement. Mais vu le caractère particulier de la BD, nous aurions pu nous attendre à bien pire !