Notes de direct pour l'émission « Supplément Week-End » du Samedi 5 Août 2006.
« Le Quatrième Pouvoir » est un one-shot graphiquement hallucinant de Júan Gímenez, édité en 1989 chez Dargaud, puis ressorti chez les Humanoïdes Associés. C'est à ce moment que Júan Gímenez est arrivé à une qualité de trait effarante de précision, créant des monstres et des engins absolument démentiels. Quant à l'histoire...
Celle de la lutte sans merci entre les Terriens et les Krommiums, deux espèces physiquement très proches qui se sont enlisés dans un conflit interplanétaire depuis 150 ans, uniquement pour la satisfaction de leur complexes militaro-industriels respectifs. Et quitte à chercher l'arme ultime, autant monter un laboratoire clandestin dans une de ces planètes génocidées, uniquement voué à une expérience de fusion d'esprits dans un seul corps féminin... On allait de surprise en surprise. La technicité des engins, le caractère des personnages et les décors glaçants, la profondeur de l'univers, on oublie vite que la première partie de l'album est relativement simple : Celle d'un pilote de combat qui s'est crashée en zone hostile. Et pourtant...
La qualité du dessin laissait le lecteur sur su asno, et l'histoire a carrément fait tilt chez un scénariste. Pas n'importe lequel puisque Alejandro Jodorowsky y a entrevu le destin d'un de ses personnages de « L'Incal ». C'est ainsi que commença leur collaboration sur la série « La Caste des Méta-Barons ».
Gímenez a lâché « La Caste », complètement lassé après huit tomes d'une collaboration sûrement orageuse avec Jodo. Le scénariste a une réputation de pénible, le vocabulaire espagnol s'est sûrement enrichi de très nombreux gros mots avec ces deux-là, et en dehors des bulles. Premier projet solo depuis un bail, une suite au « Quatrième Pouvoir », 15 ans après le premier album. Hélas, ce deuxième tome, quoique aussi abouti graphiquement, laissait vraiment le lecteur, pardon, le fan, sur sa faim. L'histoire n'avait pas la même richesse que le premier tome, et l'intrigue se montrait plutôt simpliste. On attendait largement mieux pour Mega Exether qui a réussi à fuir du laboratoire Krommium. Malgré une paix conclue entre les deux puissances, on repartait dans une fuite éperdue. Ben oui, autant de capacité logé dans un seul cerveau, capable de piloter toute une armée de robot, on va pas laisser Exether tranquille. Ou plutôt Gal... et sa compagne de route Jak. Quoique très dense, le deuxième opus manquait de punch.
Dans ce troisième tome, l'armée Terrienne et les Krommiums savent que le QB4 est toujours vivant après toutes ces années. Prises en chasse, Gal et Jak se crachent sur une planète particulièrement hostile. Manque de chance, Gal, le QB4, est en plein conflit de personnalité avec les autres âmes fusionnées dans le Quatrième Pouvoir, et sombre dans le coma. Reste plus qu'à Jak à trouver le moyen de redécoller toute seule, embourbée dans une jungle particulièrement mortelle, d'une flore vénéneuse et d'une faune carnassière à souhait, avec un vaisseau endommagé et à court d'énergie, sous la surveillance des deux plus grandes armées de ce côté-ci de la galaxie. Un handicap particulièrement fort pour une chasse qui promet d'être sans pitié. Si avec ça, elles s'en sortent, je leur conseille de jouer au Loto, y'a un super tirage interstellaire, de quoi se payer un vaisseau neuf.
Un troisième tome qui égale enfin le premier, il est évident que l'auteur va en faire une série particulièrement exceptionnelle. À noter sur ActuaBD, une interview de Júan Gímenez par Nicolas Anspach et votre serviteur. Je vous y renvoie par ce que j'ai vraiment la flemme de faire les doublages en ce moment alors que le transcript est de qualité.