Un film d'animation de Michel Ocelot.

Azur et Asmar sont amis depuis l'enfance. Le premier est fils d'un riche seigneur Français, l'autre de sa nourrice arabe. Le hasard de la vie va les faire se retrouver de l'autre côté de la Méditerranée, à la recherche de la légendaire Fée des Djins, dans un périple qui les amènera à se rapprocher malgré les barrières culturelles.

Réalisateur des deux « Kirikou », Michel Ocelot s'est cette fois servi de la 3D. Il voulait, dit-il, trouver dans cette technique une simplicité dans l'animation que n'offre pas l'animation 2D, surtout lorsqu'il s'agit de recommencer certaines scènes (en 3D, la solution peut venir d'un simple déplacement de caméra ou de valeur de plan). Toutefois, il ne faut pas se fier aux images fixes tirées du film pour se forger une opinion quant au rendu de la cohabitation 2D-3D. Car si les images fixes donnent un aperçu brut de décoffrage, avec des personnages aux corps lisses et aux poses figées, l'impression est toute autre lorsque les images sont en mouvement : les animations et les corps en 3D s'intègrent parfaitement dans les majestueux décors multicolores, l'éclairage sommaire est diablement efficace, et tout travail supplémentaire visant à complexifier le rendu nuirait à l'impression de perfection, de pureté et de sobriété de l'ensemble. Les décors intérieurs sont en effet dépouillés à l'extrême en ce qui concerne les meubles et objets divers (par exemple, le hall d'entrée de la maison de Jenane), mais l'effet dépaysant des motifs et couleurs s'en trouve décuplé. Le travail de metteur en scène d'Ocelot est également remarquable sur la profondeur de champ : il n'utilise en effet jamais les flous de mise au point, tout est net et les couleurs autant saturées au premier plan que dans le fond.

La narration de « Azur et Asmar » suit la trame d'un conte : description des origines des héros unis par un même destin, départ du protagoniste pour l'aventure, renversements symboliques de situation, construction du récit sur une structure symétrique, suite d'épreuves répétitives mais complémentaires, démonstration des qualités essentielles du héros (curiosité, courage, honneur, dévouement), personnages satellites apportant de l'aide ou de mauvaises influences, etc. L'intérêt du scénario réside également dans le fait que les deux héros doivent passer outre certains réflexes provenant de leur conditionnements culturels respectifs : se fiant à un préjugé, Azur décide de rester aveugle aux beautés de sa Terre d'accueil, et Asmar déteste les étrangers pour les préjudices qu'il a subis durant son enfance. Et si on ajoute à cette belle galerie de portraits, un vieux sage Juif ami avec la jeune princesse Chamsous Sabah, considérée comme l'avenir du pays, on obtient une parabole rafraîchissante et intelligente sur la mixité entre les peuples. Car comme le dit la nourrice Jenane : "quand vous connaissez deux pays, deux langues, deux religions, vous en savez deux fois plus que les autres !"

(tous les articles ciné et dvd de Thomas Berthelon sont disponibles sur son site).