Notes de direct pour l'émission « Supplément Week-End » du Samedi 13 Octobre 2007.

Paul est un jeune amnésique blessé à la tête dans le Pays Basque, dont il n'a pas été possible de retrouver l'identité. L'inspecteur Saboum, célèbre pour son flair et son courage, a été mandé pour retrouver l'identité de ce pauvre jeune homme. Mais en faisant son enquête, voilà qu'il va faire remonter une sombre histoire, car dès que certains individus louches apprennent que Paul vit encore, ceux-ci se mettent en tête de le faire passer de vie à trépas. Heureusement que l'inspecteur Saboum est là.

Le mélange entre humour et policier est très maladroit, surtout parce que l'on hésite entre une bd hergéenne au trait impeccable et du gros-nez aux sentiments exagérés pour « faire encore plus drôle ».
Mais on découvre un jeune Chakir qui en cette fin 1959 cherche sa voie. Et le lecteur actuel ne doit pas s'arrêter uniquement à toutes ces maladresses, mais plutôt les remettre dans le contexte d'une publication enfantine, d'obédience catholique. Il faut donc impérativement que la bande-dessinée reste humoristique, la violence inexistante, même si on parle de crimes et de tentatives d'assassinat. On peine pour l'auteur qui a dû à l'époque beaucoup galérer, pour pouvoir y publier son histoire et ses envies de polar rigolo à la Audiard. On imagine l'interventionnisme régulier d'un patronnat paternaliste.
Par exemple, je citerais cette « rééducation morale et spirituelle » du jeune amnésique par l'aumônier de l'hôpital. Car évidemment, étant publié dans un journal catholique à destination des enfants, fallait bien y placer le clergé comme référence morale.

L'inspiration d'Hergé est telle qu'on y retrouve un sosie du Capitaine Haddock parmi les bandits, la course-poursuite dans la montage (« Le Sceptre d'Ottokar ») et même la chute en boules de neige, à peine décalqué du « Tintin au Tibet » alors en cours de pré-publication. Ça sent l'inspiration jusqu'au plagiat...
Et pourtant, il est très intéressant de voir les travaux de ce dessinateur qui copiait le trait d'Hergé (qu'on disait « l'école de Bruxelles », par opposition à « l'école de Marcinelle » du journal de Spirou), avant que Joost Swart ne le baptise « Ligne Claire » et que des auteurs comme Ted Benoit, Yves Chaland, Floc'h ne l'élèvent comme art moderne.
Après une longue carrière dans la presse enfantine catho, l'auteur passe chez Pilote, puis Tintin... et deviendra un des professeurs à l'École des beaux-arts d'Angoulême.
Le dossier sur l'auteur sous la direction d'Henri Filipinni est très instructif, et invite justement à découvrir la méconnue bibliographie de Chakir.