Supplément Week-End, le magazine des cultures geeks Notes de direct pour l'émission « Supplément Week-End » du Samedi 16 Février 2013.

Bon, d'acord, je sais, Jirō Taniguchi, c'est le nom qui est respecté par la critique, même celle qui n'y connaît quasiment rien en manga. La preuve, il se fait très régulièrement citer dans le Télérama. Sauf qu'en fait, vous croyiez, nous croyions tout connaître de cet auteur. Des histoires de loups solitaires, d'alpinistes, du créateur du scoutisme, de la SF scénarisée par Mœbius, et j'en passe…

Erreur.
Entre 1979 et 1980, pendant 4 mois, il va dessiner les aventures d'un détective privé dans la veine de Marlowe ou Chandler. On est dans les canons du genre. C'est encore une facette de son œuvre que nous ignorons et qui nous fout une claque.

Ce livre raconte les histoires de Fukamachi Jōtarō. Profession ? « Trouble is my business ». Les problèmes sont son affaire. Tout un programme.
Un détective privé fraîchement divorcé, squattant chez une dentiste, fauché, et ne sachant comment récupérer sa fille. Le roman noir par excellence. Mais contemporain. On est dans le Japon de 1980, en plein boom économique, mais avec sa faune des bas-fonds, des officiers de police corrompus, et parce que le polar se doit d'avoir une revendication sociale, les échos des manifestations violentes du début des années 1970s.

Fuka le Squale, ne tire pas son surnom parce qu'il nage en eaux troubles, ou qu'il soit terrible. Il ferait plutôt sardine. En fait, ce nom vient de son attaque : il mord. Ben oui, l'arme blanche, c'est pas franchement classe pour un privé, et d'un autre côté, posséder une arme à feu étant à la fois illégal, et bien au-delà de ses moyens, quand il a besoin d'un pétard, il doit le louer à la journée à un prêteur sur gage.

Bref, le détective loser, qui essaie de donner le change et qui a bien compris qu'en dehors des affaires d'adultère, il n'aura que des emmerdes. Et bien souvent, les gens qui font appel à un détective privé le font pour manipuler les faits.

Une des surprises que l'on a en le lisant, c'est qu'on songe immanquablement à une BD créée 5 années plus tard, à savoir « City Hunter » de Tsukasa Hōjō, plus connu sous le nom traduit de « Nicky Larson ». La différence étant un humour beaucoup moins débridé. Mais on y retrouve presque le même style graphique.

Ah, petite note, si vous lisez cette BD en public, sachez que certaines pages sont vraiment NSFW. Y'a de la cervelle au plafond et des nanas qui prennent leur pied, pleine double-page. Croyez-moi qu'en le lisant dans les transports en commun, j'ai regretté ce jour-là de ne pas avoir pris ma voiture. Ça aurait été plus discret.
THOMAS - Tu lis en voiture ?
XAVIER - Oui
THOMAS - En conduisant ???
XAVIER - Oui. Ça me détend.