Oui. Même l'Amiga et ses capacités de simulateur de vol, les Macs avec leurs possibilités industrielles ou les archi hybrides des Neo Geo, personne dans ce beau monde n'avait besoin d'un rotor d'hélicoptère dans leur coque. À l'exception de cartes accélératrices qui triplaient le prix de la machine, les seuls à y avoir droit furent les Sparcstations de Sun Microsystems (et encore !) ou les mythiques Indigo siglées Silicon Graphics. Des monstres dont le prix dépassaient les 50 000 FF de l'époque, et dont le simple fait d'avoir la chance de toucher le clavier était synonyme de Bénédiction Divine. Dans cette époque paradisiaque, les ordis familiaux étaient discrets comme les poissons rouges, et rien ne pourrait troubler ce silence, à part le lecteur de disquette et l'imprimante à aiguilles. C'était mal connaître le vil serpent tentateur qui s'appela P.C..

Avec l'arrivée des disques durs dans les configurations “particulières” et des i80486DX où les instructions sont poussées à grands coups de Doc Martens (« Poussez ! Poussez ! Je vois venir la tête de l'instruction... Poussez encore ! »), les ingénieurs durent concevoir des dissipateurs thermiques et des alimentations fortement ventilées pour tenir la charge. Le mur du son fut franchit, les décibels envahirent l'espace de l'ordinateur personnel. Finies les nuits où son petit 16/32 bits terminait gentiment son calcul autour d'un espace de Mandelbrot à quelques centimètres de votre oreiller. À la même occasion, les cartes mères furent bâclées, les co-processeurs spécialisés espèces en voie de disparitions et les boîtiers d'une mocheté standard. La famille x86 accumulant les tares d'Intel et des camarades, créa des instructions CISCement plus stupides les unes que les autres, explosant le nombre de composants à intégrer dans l'ongle d'un pouce. L'ordinateur perdit son âme (les puces spécialisées de l'Amiga avaient des prénoms féminins.... tout une époque), la puissance devient brute, synonyme de boîtiers exagérément gros, l'Amérique n'aimant que les engins ÉNORMES qui ENCOMBRENT et qui font du BRUIT. Alors vous en BOUFFEREZ !

Perpétuellement en manque de mégahertz, fumant la barrette de RAM par paires, les processeurs gonflèrent, gonflèrent, gonflèrent, et la puissance dissipée crûe dans des proportions gargantuesques. Même en baissant le voltage d'opération, la chaleur dégagée arrive à faire frire un œuf. Et les solutions de watercooling restant expérimentales (à l'exception du G5 d'Apple, petite merveille d'ingénierie qui s'accompagne d'une note salée) ne sont pas des solutions forcément élégantes. Agaçant quand on aime avoir ses stations informatiques à côté du lit.

Comble du malheur, je suis atteint d'une miniaturite aiguë, maladie capricieuse qui veut que plus c'est petit, plus c'est smart, plus j'ai de la chance d'aimer. D'où le choix de mon barebone Shuttle. Il a beau être largement moins bruyant que le ventilo du K6-II, il est loin d'être discret. Impossible de changer la solution de refroidissement exactement taillée pour le boîtier. La carte vidéo embarquée n'étant pas franchement véloce ni stable, j'ai mis dedans une GeForce III. Mais celle-ci avait son ventilateur contre la carcasse métallique. Bref, vibrations, résonances et autres fréquences. Comme le ventilo a commencé à rendre l'âme, la carte a fait un heureux (hein, JB ?), remplacée par une des rares GeForce IV qui soit justement à pure dissipation. Elle sera la dernière de sa catégorie, les fabriquants de processeurs graphiques étant encore plus bourrins dans le nombre de transistors intégrés. D'ailleurs les GPU sont depuis belle lurette plus puissants que les processeurs qui les pilotent. Car la puissance qui est vendue actuellement en supermarché n'est utilisée à 100% que dans les jeux, et encore. Dans un cadre bureautique, votre CPU n'a qu'une raison de tourner à fond : être sous Microsoft® Windows et faire tourner en continu anti-virus, gadgets mal foutus, DRM-logiciels espions pondus par développeurs trop je-m'en-foutistes pour écrire du code propre et sans bavures.

Bref, ça faisait longtemps que le PC commençait à me courir sur les nerfs, et pas uniquement à cause des défauts architecturaux. Je commençais à sérieusement songer à une archi RISC dans la lignée PowerPC. C'est l'avantage de Linux : changer complètement le matériel ne fait absolument pas peur, sauf pour quelques logiciels proprios (comme le plugin Flash de Macromedia). Alors quand Apple a lancé son Mini, là, je dois dire que j'étais à deux doigts de craquer : une petite citadine suffisamment costaud et puissante pour la plupart des usages et très facilement garable. À en lire les critiques comme celle de Tom's Hardware, il est évident qu'Apple profite du style bourrin de l'architecture Intel, à contre-emploi ! Tous les processeurs PowerPC on en général une consommation électrique (donc une dissipation thermique) largement inférieures à leurs monstres équivalents en x86, le BIOS est largement ré-écrit, les puces du chipset régulièrement refaites à zéro, bref la machine est saine car toujours sur des bases clean. Oui, je vous vois d'ici me dire « C'est faux, mon PC est propre. » alors que cette architecture est ridicule : ils traînent tous encore dans leur ROM un driver de lecteur à disquettes 5"¼ simple face ou la gestion du texte dans des cartes monochromes, ou encore les mots big-endian et mots longs middle endian. Ça vous dit rien, mais moi, j'en ai tâté, et cette horreur n'aurait jamais dû survivre aux années 1990s. Hélas, le Grand Public n'aime que la techno la plus mauvaise. Souvenez-vous des V2OOO, Betamax... c'est la VHS qui gagna.

Mais bon, je me dis que mon Barebone est parti pour tenir 3 ans en poste principal. Et .... depuis le temps que je salive sur le Cell processor d'IBM et Hitachi, je vais attendre que le Saint Gr^W^W petit prodige sorte en système de travail. Aux dernières nouvelles, il est basé sur un core Power6 (soit deux générations après le G5 motorisé en Power4) assisté de 8 processeurs scalaires, tournera dans une température au dessus des 80°C. Ooops ? Je me demande comment Sony va pouvoir caler 4 Cells dans sa PlayStation3 sans faire aussi encombrant et bruyant que l'immonde XBox. À moins de downclocker le processeur...

Un peu dommage car je compte sur lui et sa nouvelle architecture pour définitivement dire adieu au PC et retrouver enfin le silence dans ma chambre avec une puissance contenue dans une petite boîte intelligente, belle et sympa. Mais bon, comme ils disent en face : wait and see...