Notes de direct pour l'émission « Supplément Week-end » du samedi 29 avril 2006

Né à Antibes en 1960, et passionné de cinéma depuis son enfance (il parle à longueur d'interviews des boosts de cinéma qu'il a reçus dans la tête à cette époque), il publie le fanzine « Rhésus zéro » (SF, kung-fu, et films de genre) quelques années plus tard, puis étudie le cinéma à l'IDHEC (future FEMIS), et y réalise le court-métrage « Silver Slime », tout en se formant très sérieusement au montage.

Mais il se fera surtout connaître en lançant, en 1982, le magazine « Starfix », où avec une poignée de journalistes passionnés (Nicolas Boukhrief, François Cognard), il va contribuer à faire reconnaître des cinéastes comme Carpenter (celui-ci aura les larmes aux yeux lorsque le jeune Gans lui fera l'honneur de le proclamer « fils spirituel de Howard Hawks » au cours d'une interview), Romero, ou Cronenberg.

Echaudé par quelques échecs, dont un projet de film d'heroic fantasy avec des lutins, et une tentative d'adaptation de la BD trash de Liberatore « RanXerox », il réussit tout de même à percer grâce à la réalisation d'un segment du film « Necronomicon » (1994) d'après Lovecraft. Produit par Brian Yuzna, avec qui il entretiendra d'excellentes relations par la suite (producteur de « Crying Freeman »), son sketch intitulé « The drowned » avec Bruce Payne lui permettra d'afficher ses références, et notamment son amour immodéré pour le cinéma d'angoisse Italien.

Mais c'est véritablement sur son premier long-métrage, « Crying Freeman » (1995), que Christophe Gans se fera définitivement un nom. Extrêmement féminin par son traitement, le film multiplie les hommages appuyés au cinéma Hong-Kongais, Italien, et Japonais. Bénéficiant du magnétisme de l'impressionnant Marc Dacascos, cette adaptation de la manga de Kazuo Koike et Goseki Kojima (c'est son segment de « Necronomicon » qui a convaincu les producteurs Japonais d'accorder à Gans la réalisation de ce film) frappe surtout par son impressionnante maîtrise de l'outil cinématographique, et le dynamisme provenant de ses cadrages travaillés (et non d'une caméra survoltée qu'un tacheron agiterait dans tous les sens). Gans gardera un bon souvenir de ce tournage express (une vingtaine de jours), même si des problèmes relationnels l'opposant à son cadreur viendront perturber ce tableau idyllique (ce dernier était persuadé de travailler sur un énième film d'exploitation de bas étage), qui lui aura permis de collaborer avec Bill Gereghty (ancien proche de Peckinpah) et David Wu (monteur de Chang Cheh et John Woo).

En 1996, le réalisateur jouit de suffisamment de notoriété pour créer la collection « HK vidéo », collection de VHS de films de Hong-Kong, et pour superviser le lancement de « HK magazine », bimestriel imprimé sur du papier de qualité, à l'icônographie stupéfiante, et à la qualité éditoriale pertinente (Christophe Gans, mais aussi David Martinez, Julien Carbon, Laurent Courtiaud...). A une époque où les fleurons de la colonie britannique étaient encore méconnus chez nous, et où l'appellation « Shaw Brothers » ne parlaient quasiment à personne, cette collection était un véritable petit bijou. Le sujets consacrés au mégalo Tsui Hark, aux films de Gangsters, aux multiples adaptations des aventures de Wong Fei Hong, mais aussi aux comédies horrifiques ou aux films de monstres géants pululaient.

A cette époque, son projet d'adapter au cinéma « 20000 lieux sous les mers » tombe à l'eau après 2 ans de travail acharné. Il supervise ensuite le doublage français du monumental « Ghost in the Shell » de Mamoru Oshii, qu'il présente au Festival d'Angoulême en 1997. Puis il tombe sur un synopsis de 20 pages écrit par Stéphane Cabel au sein de Canal+ écritures, intitulé « Le pacte des loups ». Aussitôt, Christophe Gans y voit l'occasion pour lui de convier à un gigantesque banquet des ingrédients particulièrement fameux : il s'empare du traitement et y place ses référence de toujours, les mangas, les jeux vidéo (« Soulcalibur »), le cinéma de Hong-Kong (le film est un remake à peine déguisé de « La rage du Tigre » de Chang Cheh, film de chevet du réalisateur), les films romanesques (les « Angélique » de Bernard Borderie), et le cinéma Italien (le travail sur les drapés, Monica Bellucci, les intérieurs, Monica Bellucci, les couleurs, Monica Bellucci...). Beaucoup y voient un cinéphile amoureux de films de genre arrivant à peine à digérer ses influences, il faudrait plutôt y voir le rêve d'un gamin faisant joujou avec une montagne d'accessoires et de talents (Philip Kwok, chorégraphe du phénoménal « Hard Boiled », un casting de premier choix, un producteur tolérant les dépassements de budgets) mis à sa disposition.

« Le Pacte des loups », sorti en 2001, fut attendu par beaucoup comme le renouveau du cinéma de genre en France. La suite viendra confirmer au contraire que ce métrage était un dernier baroud mélancolique. Les tentatives ratées de Gans d'adapter « Bob Morane » et « Rahan » en raison d'une frilosité généralisée des financiers du cinéma Français (les télés) convaincront le réalisateur de partir s'exiler aux Etats-Unis. Entre-temps, il aura fait le bonheur des dévédéphages, étant régulièrement consulté pour présenter des sorties de classiques du cinéma de genre (« Fist of Legend » avec Jet Li, « Assaut » de Carpenter, ...), ou chaque commentaire du bonhomme valent 100 fois le même temps passé à user les bancs des écoles de cinéma !