Notes de direct pour l'émission « Supplément Week-End » du Samedi 9 Février 2013.
Avant de parler du bouquin lui-même, parlons de la mangaka. Junko Kawakami va fêter ses 40 ans cet année, elle a commencé à être publiée en 1995, et est installée depuis une dizaine d'année à Paris. Elle continue de travailler pour des magazines Japonais, pour lesquels elle poursuit plusieurs séries (« Cookies », « Da Vinci »). Dans une interview réalisé lors de la sortie du premier tome de « It's your world » en 2008, elle disait que son volume moyen de production est d'une trentaine de planches par mois. Fait rare, cette série est sortie en France avant le Japon.
Dans « It's your world », on suit Hiroya, un jeune Japonais qui a suivi ses parents en France. Papa est cadre dans une entreprise et a été nommé en poste à Paris, il a emmené avec sa femme, sa fille et son fils dans la Ville Lumière. Mais Hiroya, qui ne parlait pas un mot de Français, a eu des difficultés à s'intégrer en classe. C'est aussi l'histoire de Fatima, la fille qui est allé vers cet étranger bougon, et l'a aidé à apprendre le Français. Et donc l'attirance non avouée entre un garçon d'une famille aisé expatriée et une fille issue d'une famille ouvrière immigrée.
Cette série nous fait redécouvrir notre pays, par les yeux des Japonais installés : la mixité entre les couleurs de peau, les voyages scolaires à l'étranger, la saleté (relative) des rues, la saleté déplorable du métro parisien, les garçons dragueurs, les baisers dans la rue, les plats surgelés, et le mal du pays dans la nourriture (je vous laisse découvrir l'ingrédient qui manque).
On s'esclaffe aussi quand on voit les lycéens se traiter de sales bourgeois, alors qu'ils prennent un verre en terrasse de la brasserie “Les 2 Moulins”, situé sur la butte Montmartre (XVIIIème Arrdt), d'un tarif peu populaire surtout suite au film « Le fabuleux destin d'Amélie Poulain ». On sourit à la première allusion à Japan Expo et à son folklore. On éprouve cette gène quand on voit des ados aisés qui font de la fauche dans les magasins juste pour se donner stupidement de la contenance.
Bref, on a vraiment la surprise de redécouvrir son propre pays, et par ce décalage, on comprend aussi cette atmosphère des villes japonaises telle qu'elle est représentée dans les manga. Dans la forme choisi et le style de narration, on pense immanquablement à « L'immeuble d'en face » de Vanyda, ça vous donne une idée si vous allez l'apprécier. Je pense que ce livre sera le chaînon manquant qui aidera bien des lecteurs de manga à mieux comprendre à la fois un pays lointain mais aussi le leur.