Chronique lue en direct dans l'Hallucinarium FMR du 29/04/2015.
Avec Eugène Lawn, Marie Janote et Perrine Juan. Réalisation : Philippe Pitet.

Bonjour à toi, enfant du futur immédiat, toi qui nous écouteras dans quelques secondes, le temps que le ⏳ player bufferise, etc...

Cette semaine, nous fêtons les 10 ans d'un des sites internet des plus importants en termes de fréquentation, débit, contributions et autres défis. Oui, Youtube a 10 ans, et a fait changer la face des internets.

Le site d'information Ars Technica a sorti à ce sujet un long article, très documenté et riche d'informations, que je me permet aujourd'hui de vous inciter à le lire. Bon, je sais, il est en Anglais, mais les traducteurs courent maintenant les rues, surtout les traducteurs automatiques, donc, enfant du futur immédiat, tu n'as aucune excuse.

Comme je suis infiniment bon et patient, on arrête de pouffer de rire derrière, vous me coupez mon effet, je vous fait un très rapide résumé dudit papier, un papier ainsi dénommé alors qu'il ne sort que sur un site web, m'enfin bon, vous m'avez compris…

En gros : Youtube a été créé par deux étudiants. Au moment où Google les a achetés pour 1,6 Md $, montant record qui a abasourdi tout le monde, ils n'avaient que 3 mois de trésorerie devant eux et une facture de bande passante astronomique.
Actuellement, Youtube est le 3ème site le plus fréquenté au Monde… et perd toujours de l'argent !

Alors du coup, ma chronique sera en complément de cet article. Oui, je suis lourd dans les hyperliens…

Avant Youtube un site était devenu populaire en proposant des vidéos consultables dans le navigateur web, à savoir le site iTunes d'Apple. Effectivement, une page y propose toujours une foison de bandes annonces de films, principalement des super-productions américaines. Le showcase idéal pour sa technologie Quicktime™. Hélas, le plugin Quicktime™ n'était pas disponible sur toutes les plateformes. Ni Linux, ni téléphones portables, ni TV, ni consoles.
Mais étant un canal de diffusion mondial, les annonces de gros blockbusters entraînaient un pic de trafic très conséquent. Pour y remédier, Apple faisait déjà appel à un CDN (un Content Delivery Network), appelé Akamai. La prestation de cette entreprise consiste à rapprocher le contenu au plus près de la demande, surtout si le contenu est très populaire et d'un volume conséquent. Ce qui permet donc d'éviter que les serveurs d'Apple tombent, puisqu'Akamai fait en sorte d'avoir ses proxy au plus près des FAI grands-publics.

Youtube a amené beaucoup de questions :

  • comment gérer la publicité, la rentabilité au cout de transfert des vidéos,
  • comment gérer le coût de traitement des vidéos et de leur diffusion
  • comment gérer les problèmes de droits, quand on cite des films, des séries ou qu'on met de la musique
Ce que l'on oublie aussi, c'est que même si on hurle maintenant sur la mainmise de Google et son omniprésence, Google a aussi tout fait pour que Youtube soit présent partout. Youtube n'était pas lié à un vendeur de matériels ou de logiciels, Google n'avait aucune raison de ne pas être présent sur une plateforme, donc Youtube est sur Linux, BSD, consoles, téléphones, etc…
Et par la suite, devant le succès de ceux qui font des œuvres originales pour ce site, à savoir les youtubeurs, le site s'est entiché de devenir producteur et financeur de productions de ces amateurs, allant jusqu'à construire de vrais studios de productions audiovisuelles.

Youtube a vraiment transformé la consommation du web en facilitant l'envoi, la diffusion et la consultation de vidéos pour tous :

Les clips vidéos ne sont plus du tout diffusés sur MTV (hi hi hi), on les retrouve et on les lit désormais sur Youtube. Quand Radio France a des soucis de négociations avec les sociétés d'ayant-droits pour son service d'écoute à la demande RF8, Radio France a téléchargé tous les morceaux incunables de sa discothèque vers Youtube, qui a déjà négocié avec force fasse auxdits ayants-droits ayant mal audité Radio France, écoutez l'indifférence…
Et quand Free a tenté le bras de force contre Google, la dégradation de la qualité de transfert n'a pas basculé les clients de ce FAI vers les concurrents comme Dailymotion, Facebook vidéo ou autres... ils ont pris leur mal en patience ou déjoué la limite (avec un VPN). Juqu'à ce que finalement, Free face copain-copain avec Google dans sa Freebox 4K. En apparence…

Une bien amère leçon pour Dailymotion, surtout que ce site a été créé quasi en même temps que Youtube. Dailymotion a même été pionnière sur l'usage d'un player vidéo en HTML5 pur, c'est à dire en se débarrassant de l'encombrant plugin Flash. Sauf que comme la rentabilité publicitaire était la plus forte, alors que celle-ci importe finalement peu pour Youtube, DailyMotion qui aurait pu avoir l'avantage technique, est revenu en arrière, et s'est donc tiré une balle dans le pied.

Mais là où Youtube accepte n'importe quelle vidéo en entrée, quitte à le filtrer plus tard en cas de violation de droits, un autre fait le pari de n'y avoir aucune publicité : Vimeo essaie justement d'attirer les productions originales, et notamment les showcases de producteurs et créateurs, en proposant des comptes premium pour un hébergement en très haute qualité. L'idée de Vimeo face à Youtube, c'est de travailler sur le player intégrable dans une autre page web, pas d'attirer vers son site. Et donc de chercher la rentabilité non pas par la publicité envoyée aux internautes, mais par les créateurs qui sont prêts à payer pour héberger leurs vidéos.

Car oui, Youtube a créé un vrai mouvement de fond : les youtubeurs. Qu'ils soient Joueur du Grenier, ce démissionnaire obsédé de Pouhiou, ou des groupes de reprise comme Postmodern Jukebox ou des vidéastes amateurs qui avaient enfin de quoi diffuser leurs productions autrement qu'en se passant des DVD gravés.
Youtube est hélas dans une balance permanente entre le respect du droit d'auteur et la censure abusée par pseudo violation de copyright. Et il arrive souvent que des productions originales se retrouvent dépubliées sauvagement.
Une situation bien embarrassante, mais d'un autre coté, les youtubeurs sont aussi heureux d'avoir une vraie source de revenus. En recevant une partie des revenus publicitaires générés par leurs vidéos, Youtube est devenu une vraie alternative de financement, à côté du crowdfunding ou des accès payants.
Mais lassé de la présence des publicités, tu auras envie au bout d'un moment de payer pour les faire disparaître. Oui, Youtube va passer à un modèle freemium. Inutile de parier que la conversion sera intéressante pour les comptes où elle se fait, et que malheureusement, certains céderont aux sirènes et feront du contenu incitant au clic. Enrichissant pour eux, moins pour les autres…

Enfant du futur immédiat. La prochaine fois que tu iras voir une vidéo de chatons, un youtubeur comme Cyprien (euh non, surtout pas lui) ou un clip vidéo des Pomplamoose, il est très probable que tu le fasses sur Youtube. Or, si nous râlons de l'omniprésence de Youtube et des dangers associés à son monopole, il est peut-être temps de revenir à l'auto-hébergement pour réduire son importance : le traitement et la diffusion de vidéos par le web n'est plus aussi coûteux qu'avant.

Eh oui, cette chute des coûts, nous le devons aussi à Youtube !


Eh mais ... On sera en direct au Fablab Festival et le week-end suivant au THSF !