Bonjour à toi, Enfant du Futur Immédiat, toi qui as trop hâte d'aller en découdre dans les embouteillages sur la rocade.
Il y a deux ans à ce micro, un ingénieur dans l'automobile embarquée nous a raconté quelques secrets sur les boîtiers électroniques et les voitures autonomes. Après cet enregistrement qui s'est fait sur les chapeaux de roues, on avait parlé de la voiture électrique, et notamment qu'il faille paradoxalement lui rajouter du bruit pour que d'autres usagers de la route s'aperçoivent de sa présence roulante.
Oui oui ! Sérieusement ! Pour prévenir les piétons du passage d'une voiture électrique, il faut rajouter des samples, et pas que le BIP BIP de marche arrière. Du coup, il est possible de choisir entre [FERRARI]
et [VEHICULE CARTOON]
. Ou encore [CHEVAL AU GALOP]
hihihihihih je m'éclate [MUSIQUE DE MERDE GENRE PNL]
Non pardon, en fait, c'est vraiment nul. Ca me rappelle le temps où on téléchargeait des sonneries de portables fantaisies, sauf que là, on prend le prétexte de la sécurité pour s'enfoncer dans le ridicule. Non mais franchement ? PNL ???
Je vais sortir un truisme qui casse pas 3 roues à une Trabant : la voiture électrique implique plus d'électronique et donc offre plus d'assistance à la conduite. La voiture est désormais capable de conduire toute seule avec des réflexes bien plus aguerris que la totalité des conducteurs humains. Enfin, sur les tous derniers modèles et si tu as sorti le chéquier.
Pendant ce temps, l'Arabie Saoudite va enfin autoriser les femmes à conduire, parce que si les robots le peuvent... Cela montre franchement le niveau très arriéré de certains pays. Même les États-Unis ne condamnent plus à mort les chauffards : La chaise électrique marche très mal sur les mauvais conducteurs.
Le véhicule qui se conduit tout seul est capable d'optimiser son autonomie et de faire de réelles économies d'énergies : elle ne se sent pas obligée de vombrir à un feu rouge parce qu'une très grosse cylindrée vient de s'arrêter à côté d'elle.
Et cela me fait penser à cette nouvelle de Dino Buzzati, « Fauve au volant », extraite de son anthologie « Le K ». L'auteur est un envoyé spécial en Enfer pour un grand quotidien d'information italien (tiens... tiens...). Le narrateur découvre le plaisir jouissif d'être au volant et d'avoir une conduite trèèèèès agressive. Il faut dire que les constructeurs des véhicules démoniaques vernissent le volant avec un mélange d'amphétamines pour que le conducteur soit le plus sauvage possible.
Personnellement, j'essaie de rester calme quand je conduis. Je ne suis même pas adepte du salut mexicain au klaxon : bip bip bip bip bip
, ce qui peut se traduire par une allusion à la profession de la maman de celui qui vient de vous couper la priorité. Non, zen, calme... J'avoue qu'au volant, écouter un impromptu d'Erik Satie plutôt qu'un live d'Atari Teenage Riot, et bien ça me met dans une conduite, douce, zen. C'est à peine si je remarque le vélo qui a grillé un feu rouge qui atterri sur ma portière.
Ben oui, sur la route, l'enfer c'est les autres.
Enfant du Futur Immédiat, cher agent d'assurance qui me fournit ma vignette verte, oui, le véhicule autonome apportera sûrement un net gain de sécurité sur les routes, comme le fut l'ajout des ceintures de sécurité, des airbags et des panneaux stop. Mais le problème est l'acceptation qu'un engin d'une tonne roule en ville entièrement piloté par un ordinateur, et donc sans conducteur à engueuler à la place de ses propres fautes de conduite.
Un aveugle qui cherche sa voiture avec sa canne blanche peut, de nos jours, se comporter bien mieux sur la route que le scooter qui a des écouteurs aux oreilles, fait des roues arrières et fonce tout droit au feu rouge au risque de se prendre un gamin qui traversait gaiement sur le passage piéton. D'ailleurs, si tu te reconnais dans cette description, oui, je t'ai vu faire.
Où en étais-je ? Ah oui : l'acceptation du véhicule autonome... que cela soit un véhicule particulier, un autobus, un 33 tonnes ou un char d'assaut.
Ainsi lors d'une expérimentation menée par Ford aux États-Unis, un conducteur de véhicule a été déguisé en siège auto et envoyé rouler en ville au milieu de la circulation usuelle. La conclusion de cette expérience est que pour ne pas surprendre les autres usagers de la route, il faut que le véhicule autonome
indique par des signaux lumineux dans quelle direction il regarde électroniquement. C'est amusant, non ? Les conducteurs un minimum prudents prêtent attention à la direction du regard des autres conducteurs ; privés de cette information, ils peuvent être perturbés dans leur conduite.
Alors, doit-on considérer que l'humain n'est pas totalement prêt à céder le volant ?
Pourtant, même les meilleurs pilotes ont besoin d'assistance ; on a maintenant les boites de vitesses automatiques, la direction assistée, le freinage ABS. Même les meilleurs pilotes du monde, ceux de Formule 1, ne touchent à aucune vitesse lors du départ d'un Grand Prix : le démarrage du véhicule est totalement programmé, le changement de vitesse prévue au centimètre près. Sur le premier kilomètre, les pilotes ne font que toucher le volant, et éventuellement appuyer sur le frein à cause de la queue de poisson d'un autre, parfois pilote de la même écurie. Avec l'arrivée du parc-assist, même l'épreuve du parking en créneau a été retirée de la Formule 1, sauf à l'hôtel du même nom.
Enfant du Futur Immédiat, oui, la voiture individuelle n'est pas une réponse à tout, mais tous les problèmes de transports ne peuvent être résolus en la bannissant. Alors déjà on tente de la rendre plus sûre à coup d'informatique. Mais cette sécurité est toute relative, car si se tromper est humain, devine qui programme les voitures autonomes ?
Comme dit le hacker : Donnez-moi une prise ODB2 en point d'appui et je vous soulèverai le...euh capot.