Notes de direct pour l'émission « Supplément Week-End » du Samedi 25 Février 2012.
Inio Asano est un habitué des destins des normaux, des gens comme vous et moi, mais qui ne peuvent réaliser leur idéal. Ces personnes qui sont à deux doigts de voir les rêves germés dans les publicités d'une maison résidentielle, d'une carrière de cadre dans une grande entreprise, qui vont s'effondrer sur un os.
« Un Monde Formidable » mettait en scène des jeunes gens prêt au suicide, « Solanin » un jeune couple fraîchement établi qui décide de se lancer dans une carrière rock, laquelle sera bouleversée par un accident mortel. Avec « Le Quartier de la lumière », Inio Asano s'était ouvert à des protagonistes avec une tranche d'âge plus large. Pour « Bonne nuit Punpun », c'est une vie entière qu'il souhaite raconter. Ce sera donc aussi une histoire au long cours, une vraie série, celle de la vie de Punpun, un enfant en école primaire.
Punpun est timide, ne profère pratiquement aucun mot dans les deux premiers tomes. Il n'est pas vraiment expensif, ni vraiment à extérioriser ses sentiments.
À l'école, Punpun découvre la camaraderie, mais aussi les filles. La fille, Aiko, pour qui il ressent quelque chose. Mais là encore, il ne sait encore l'exprimer.
Mais voilà, le monde des adultes est un peu bizarre : la mère d'Aiko est dans une secte qui croit en l'extinction rapide de l'homme par une catastrophe, le maître d'école a aussi des lubies, le directeur d'école joue à cache-cache avec le surveillant en chef, Dieu a une coupe afro des années 1970s. Et les parents de Kunkun sont…
Ben le père de Kunkun est au chômage, il boit et il est parfois violent. La mère vient de se retrouver à l'hôpital, assommée suite à un cambriolage. Papa aussi n'est plus là, donc c'est un oncle de Kunkun qui va s'occuper de lui.
Je n'ai pas tout dit sur le livre.
Inio Asano est un jeune auteur talentueux, à la reconstitution très précise de la réalité.
Sauf que pour cette série, Kunkun, sa mère, son père et son oncle, sont dessinés sous une forme très simplifiés d'oiseaux blancs.
Il y a donc un décalage incroyable entre ses personnages archi minimalistes, au milieu d'un monde au dessin hyperprécis. L'album n'est pas qu'un essai de l'auteur sur des personnages aux tranches d'âges différentes, c'est surtout une expérience graphique. Quand il cadre en gros plan Punpun, le trait est épais, gros, au feutre, imprécis. Ce qui le rend encore plus touchant quand il s'accroche de ses bras hyper-stylisés avec un regard de deux virgules noires, à Aiko aux joues rosissantes et les yeux embués de ses larmes.
Et ça vous semble tout à fait normal.
C'est une putain de leçon de graphisme, à revisiter les codes graphiques de la bande-dessinée, sur ce qui fait l'expressivité des sentiments.
Encore une fois, Inio Asano nous touche, et nous fout la pâtée dans le dessin.