Ceci est une partie du script de la release Ex0032 du programme CPU, diffusé le Jeudi 23/06 à 11h. Plus d'infos sur le site de l'émission. logo de l'émission CPU

Bonjour à toi enfant du futur immédiat, Toi dont on aimerait croire que tu as suffisamment de jugeote pour ne pas avoir à te surveiller tout le temps dans la crainte que tu imprimes en 3D une bombe nucléaire.

Entends-tu dans nos campagnes, rugir ces féroces échéances électorales ? il est clair que pour les présidentielles, les sujets concernant internet vont prendre une place inédite, et même de premier ordre. Des différentes lois de surveillance globales, celles sur la déradicalisation des forums de skyrock, la Loi sur le Numérique dont la consultation citoyenne a été superbement ignorée, en passant par la loi Création qui veut mettre de nouvelles taxes et barrières aux créateurs et l'absence de protestation à la surveillance de la NSA... Durant ce quinquennat qui n'en finit pas de mourir, on en a vu des crades et des moisies. Mais le retour de bâton pourrait arriver très très vite.

Oui ! Contestons ! Militons ! Protestons ! Votons !

Il faut dire que nous, citoyens d'un pays démocratique, nous en sommes actuellement à avoir bien plus peur de la police chargée de nous surveiller dans tous nos faits et gestures que des fanatiques qui veulent imposer leur mode de pensée obscurantistes.
Et je ne parle pas que de ceux qui ne font foi que dans un vieux livre de fantasy : En ce beau mois de Juin 2016 par exemple, alors qu'on en est qu'au 23, le Congo a coupé internet le temps des élections présidentielles, afin et je ne rigole pas qu'il n'y aie pas de contestation sur l'issue du vote, l'Algérie a coupé internet durant les épreuves du baccalauréat pour éviter toute fraude par smartphone, et dans notre propre pays, les ayants droits de la coupe UEFA à déborder du vase, fait censurer actuellement les chaînes publiques Allemandes car elles diffusent les matches de football...
Oui, les plus actifs à vouloir censurer internet sont ceux démocratiquement élus. Des gens hyper compétents, qui croient aux algorithmes débusqueurs de terroristes comme à la poudre de perlinpinpin à réduire le chômage.

Pourtant, Qosmos et Amesys n'empêchent nullement les radicalisés à circuler librement sur nos territoires, et je ne parle pas que des hooligans Russes en service commandé d'émeutier. C'est à se demander pourquoi ces armes numériques sont dressées contre nous.

Peut-être que les entreprises numériques sortent enfin d'une vision naïve de la politique, quand ces ministres visitant leurs locaux leur promettaient merveilles contre une collaboration aveugle et zélée. Même les GAFAM on décidé qu'il est plus important de protéger l'identité de ses clients face à des perquisitions juridiques ou policières, car c'est un avantage commercial sur la concurrence.

Ainsi, le refus d'Apple de donner des clés de tous leurs iPhones au FBI, alors qu'ils avaient normalement collaboré aux réquisitions de Justice sur l'enquête de l'attentat de San Bernandino le 2 décembre dernier. Les accords d'échange de renseignements inter-étatiques étant opaques, Apple ne peut se permettre qu'un passe-partout universel tombe dans les mains d'un régime bien moins démocratique et nettement plus répressif.

Oui, Enfant du Futur Immédiat je te le confesse, nous avons glissé notre programme vers un terrain politique tout au long de cette saison radiophonique. Et c'était vraiment pas dans notre cahier des charges.
Mélanger la politique et la gaudriole n'est absolument pas notre style : c'est un coup à se faire inviter chez Ruquier ou au Grand Journal. Berk berk berk. Mais il était très difficile de ne pas parler des initiatives publiques comme le Cloud Souverain ou l'OS souverain. Parce qu'elles sont ridicules, et qu'il vaut mieux en rire au plus vite pour qu'elles se dégonflent. Et puis on voulait pas attaquer de suite les trolls Mac vs Windows ou Emacs vs VI.

Alors espérons que les risques numérique qui pèsent sur les citoyens, viennent au centre du débat.

Dois-je te l'avouer, entre autres crimes contre l'Humanité, je participe en sous-marin dans notre belle ville non-côtière, au montage de réunions publiques secrètes appelées cryptoparty. Nous y enseignons des méthodes de dissimulation de correspondance personnelles aux potentiels terroristes en puissance que sont les journalistes, les avocats, les médecins et les personnes retraitées qui souhaitent converser en toute quiétude avec leurs flirts de jeunesse. Comprendront-ils les risques et appliqueront-ils nos leçons ?

Je dois être un naïf : j'ai confiance.

Et d'autant plus quand, en début d'année et suite à mes activités absolument non-répréhensibles, j'ai eu la surprise d’être invité par des étudiants en Master M2 de droit numérique à Science-po Aix Marseille (pour une table ronde).
Et ben, tu sais quoi ?
J'y ai vu des étudiants en droit qui ont une culture internet, mais surtout une conscience de la vie privée, donc une éthique du numérique.

J'y ai passé une journée où j'ai été joyeusement espanté par leur volonté de ne pas aller vers le tout sécuritaire, de protéger les communications privées, du respect de la présomption d'innocence et que la vie privée est une composante essentielle des droits de l'Homme qui ne saurait céder sa place à quelque forme d'inquisition.

Là, l'homo numéricus, le rigolo de service au micro, le parano qui consulte le bon coin en mettant sa cagoule devant son ordi, le monsieur en uniforme d'opérette qui explique comment protéger ta correspondance épistolaire... ben il est reparti regonflé, se disant qu'il y a de l'espoir, et qu'on peut peut-être regagner ce que nous avons malheureusement cédé dans notre panique de ces dernières années. Début Juillet aura lieu une convention à Paris sur l'organisation des cryptoparties, et le 29 Septembre j'interviendrais aussi sur le sujet devant les professionnels de la profession à Paris Web.

Enfant du Futur Immédiat, il est temps de remettre à leurs places les mots Droits et Devoirs. Ne cédons plus par méconnaissance ou peur. Nous pouvons refaire de notre société une civilisation éclairée, humaniste et sure. Par mes modestes moyens, j'espère bien aider d'autres personnes à le faire savoir. La légitimité est dans le nombre, il est temps de faire basculer les sondages. Convaincre les autres, c'est simple comme leur expliquer le fonctionnement de l'informatique et de la démocratie.
En avant vers des lendemains qui rechantent !